Contexte
La
villa romaine de Mageroy, située dans la frange ouest de la cité
des Trévires à l'époque romaine, se trouve aujourd'hui à
proximité du village d'Habay-la-Vieille, dans le sud de la Belgique.
La
partie résidentielle s'élevait au sud de la rivière Rulles, sur le
flanc nord de la première cuesta gaumaise culminant à 385 m
d'altitude. Son implantation à la limite de l'Ardenne au nord et de
la Lorraine au sud lui a permis un approvisionnement en matériaux de
construction variés (schiste ardennais et grès lorrain).
Contrairement
aux règles urbanistiques romaines, la villa fut bâtie dans le creux
humide d'un petit vallon, lui offrant, certes, les avantages d'un
ruisseau alimenté par plusieurs sources, mais obligeant aussi ses
bâtisseurs à construire des fondations de près de 3,80 m par
endroits, et l'édification d'une terrasse de sable artificielle sur
le flanc Est du vallon, créant ainsi un sol nivelé à deux niveaux.
La
voie romaine Reims-Trèves située à cinq kilomètres au sud de la
villa, et la proximité du vicus d'Orolaunum (Arlon) à quinze
kilomètres favorisaient les échanges de la villa avec le monde
extérieur.
La
découverte du site
Quoique
le site fût déjà connu, de par sa toponymie particulière et la
« légende des trois châteaux » attachées au lieu-dit
« Mageroy », c'est Benoît Halbardier et Alain Thomas qui
l'ont redécouvert en 1984, grâce à leurs prospections, et d'après
les indications rapportées par l'ancien propriétaire de la
parcelle en 1840.
A
présent, c'est l'asbl ARC-HAB (Groupe d'archéologie de Habay) qui
fouille et étudie le domaine de la villa tout en assurant sa mise en
valeur et en développant plusieurs activités dans le but de
sensibiliser le grand public au patrimoine et à l'archéologie.
(Plusieurs
archéologues professionnels, ainsi que deux ouvriers et plusieurs
dizaines de bénévoles collaborent avec l'asbl, administrée par
neuf membres. Elle est aussi soutenue et aidée par le SPW (Direction
de l'archéologie), le Forem, la Commune de Habay, le Commissariat
Général au Tourisme, la Province du Luxembourg et quelques privés.)
Plan
général
Les
fouilles, toujours en cours, ont révélé une villa
de plan axial à deux niveaux (partie basse à l’ouest, partie
haute à l’est) occupée du milieu du 1er
siècle à la fin du 4e
siècle. La pars
urbana comprend le corps
de logis précédé d'une cour résidentielle fermée côté nord.
Cet ensemble se trouve presqu'au centre de la pars
rustica qui s’organise
entre quatre bâtiments annexes, un grand bassin et trois fours à
chaux. Tout cet espace était ceinturé sur trois côtés par un mur
en schiste de 196,5 m à l’ouest, 143,5 m au sud et 172 m à l’est.
Les
différentes phases d'occupation
Les
fouilles ont pu démontrer plusieurs phases d'occupation du site. Du
matériel archéologique a révélé la présence hypothétique d'un
habitat en bois ou en torchis aux abord d'un étang, vers le milieu
du premier siècle. Ensuite, la construction d'un corps de logis en
grès jaune local est attestée, dès la fin du premier siècle, sur
une terrasse artificielle dominant cet étang.
La
façade de l'entrée, orienté au sud, était longue de 28 m et les
murs latéraux mesuraient 19 m. De ce côté sud, la galerie à
colonnade était ponctuée à chaque angle d’une petite pièce
carrée d’environ 4 m de côté. Au centre se trouvait une grande
salle de 170 m² pourvue d’un foyer. Cette salle était cernée à
l’ouest par une aile rassemblant vraisemblablement les appartements
et les pièces privatives, et à l’Est par des pièces communes. Le
long des communs, un escalier menait à la cave située dans l’angle
nord-est du bâtiment.
C'est
au milieu du deuxième siècle que la villa atteindra son apogée.
Elle est alors dotée de salles sur hypocaustes et de thermes.
L'entrée étant désormais orientée au nord, et l'étang remplacé,
à cette époque-là, par un bassin aquatique muré.
La
découverte de nombreuses scories de fer, de bronze et des déchets
de plomb semble indiquer la présence de plusieurs ateliers
métallurgiques, au sein du domaine, qui ont pu fonctionner à
différents moments.
Comme
bon nombre d'établissements à l'époque, la villa de Mageroy a
probablement été incendiée, lors des invasions barbares de la
seconde moitié du 3e
siècle (vers 262). Deux trésors monétaires retrouvés dans les
décombres de la cave et de la grande salle confirmeraient cette
hypothèse.
Néanmoins,
le site fut réoccupé, et de nouveaux aménagements et constructions
furent ajoutés, dont un important porche d'entrée, vers la fin du
3e siècle. L'occupation subsistera jusqu'à la fin du 4e
siècle, avec plusieurs aménagements supplémentaires, dont des
latrines, une tour-silo et deux séchoirs à grains. Le reste des
constructions en place à cette époque-là fut fortifié par les
nouveaux occupants.
Finalement,
les ruines du site serviront de carrière de pierres pour la
construction des forges de La Trapperie de Habay au 17e
siècle.
Merci
à Jean-François Baltus, Marie Buczaga, François Casterman et
Benoît Halbardier pour les informations fournies pour la rédaction
de ce résumé.
Photo aérienne du site prise en juin 2017 (© Sébastien Lambot, Sensar Consulting)
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