Présentation

Même si l'Antiquité romaine fut une période rude et souvent implacable pour beaucoup d'êtres humains, nous ne pouvons nier que dans de nombreux domaines la civilisation romaine fut innovante et même fascinante. Si Rome a conquis nos terres à la force du glaive pour imposer ensuite son pouvoir sous la férule des légions et de son administration centralisée, elle nous a aussi légué sa culture et, pour ce qui nous intéresse dans ce blog, son savoir-faire en matière d'urbanisme, d'architecture et de construction. C'est précisément ce domaine des habitations romaines typiques des campagnes, les villae, que je vous invite à découvrir ensemble.

mardi 1 juin 2021

Une villa en Armorique

 La villa gallo-romaine de Mané-Véchen

Si la Bretagne est bien connue pour son patrimoine mégalithique, elle recèle également quelques témoins intéressants issus de la période romaine.

Les vestiges de la villa gallo-romaine de Mané-Véchen, non loin de Plouhinec dans le Morbihan, constituent un exemple représentatif pour cette époque.


Résumé à partir de différentes sources :

Située sur un petit promontoire granitique au bord de la rive droite de l'estuaire de la ria d'Etel, à moins de deux kilomètres de l'Océan, cette villa maritime se trouvait en pays vénète ; tribu gauloise célèbre pour avoir combattu l'armée de Jules César lors d'une bataille navale au large de la presqu'île de Rhuys.

L'édifice, bâti dès la fin du second siècle après J.-C., aurait été abandonné vers la fin du IIIe siècle suite à un incendie. Il fut néanmoins réoccupé partiellement au tout début du IVe siècle, soit seulement un siècle d'occupation en tout !

Les découvertes réalisées lors des campagnes de fouilles successives laissent penser que la villa fut le siège d'un centre de négoce de produits maritimes (sel, garum, pêche et/ou commerce maritime ?).

Plusieurs dépôts monétaires importants mis au jour lors des fouilles semblent confirmer cette vocation commerciale.

Dépôts monétaires découverts, crédit : Musée de Bretagne à Rennes



Le site fut découvert en 1929 et une fouille de sauvetage fut entreprise en 1966 par G. Bernier en raison de l'érosion marine qui menaçait une partie des vestiges. Ensuite, le domaine fut acquis par l'Etat en 1972, après plusieurs campagnes de fouilles fructueuses réalisées au début des années 70, et pour éviter que les ruines ne disparaissent à tout jamais sous les coups des pelleteuses d'un projet de construction d'un lotissement.

Les dernières fouilles menées de 2000 à 2007 par l'archéologue Alain Provost ont permis de révéler l'ampleur et l'importance du site.

L'ensemble des vestiges, couvrant une superficie d'environ 3000 m2, est réparti sur trois ailes en forme de U autour d'une cour centrale avec en son centre un bassin hexagonal.

L'aile nord mesure 38 m sur 10, l'aile ouest 36 m sur 20 et l'aile sud fait 30 m sur 16, soit près de 1600 m2 de surface habitable. Les murs arasés sont maçonnés en petit appareil de moellons de granite local équarris. L'entrée, accessible par un porche, était située au sud.

La cour centrale mesure 27 m (axe nord-sud) sur 31 m (axe ouest-est), soit presque 840 m2.

Enfin, un petit bâtiment tout proche de la villa pourrait correspondre à un fanum privé.

Vue d'ensemble, crédit : journal « Ouest-France », Grégoire Laville, 17/12/17



Plusieurs locaux ont pu être identifiés, comme une bibliothèque ou une salle d'archives, de vastes salles de réception richement décorées, des bains, des pièces chauffées par hypocauste, des portiques, une tour de guet (?), une exèdre (salle dotée de sièges où l'on conversait) et un espace destiné à l'élevage et à la boucherie, en service vers la fin de l'existence de la villa. C'est là où a été retrouvé un haut-relief représentant Dionysos découvrant Ariane endormie sur l'île de Naxos.

Il est vraisemblable qu'il y ait eu une quatrième aile disparue sous l'effet de l'érosion marine et de l'exploitation d'une petite carrière située à l'est du site.

Haut-relief trouvé au milieu d'ossements dans la boucherie de la villa



En plus des différents dépôts monétaires, constitués de deniers et d'antoniniens antérieurs à l'année 282 et rassemblant quelque 22000 monnaies, le site a livré de remarquables enduits peints, dont une représentation d'un buste de Vénus, des animaux et des personnages grandeur nature. On y a également mis au jour des stucs, des éléments architecturaux, une balance en bronze, des outils en fer, des céramiques intactes et fragmentaires ainsi que le haut-relief de Dionysos et des éléments de statues.

Le nom du propriétaire de la villa aurait même été identifié par une inscription conservée au Musée de Bretagne.

Le domaine est classé comme site archéologique depuis mai 2010, mais il peut être visité moyennant une petite contribution.

(Le dessin au début du texte provient du site "Les Amis de l'Art Contemporain du Musée de 56000 Vannes, France").

Renseignements: https://www.plouhinec.com/decouvrir/visites-activites/mane-vechen.html

Vidéo :


Juin 2021

Ph. Laval