Présentation

Même si l'Antiquité romaine fut une période rude et souvent implacable pour beaucoup d'êtres humains, nous ne pouvons nier que dans de nombreux domaines la civilisation romaine fut innovante et même fascinante. Si Rome a conquis nos terres à la force du glaive pour imposer ensuite son pouvoir sous la férule des légions et de son administration centralisée, elle nous a aussi légué sa culture et, pour ce qui nous intéresse dans ce blog, son savoir-faire en matière d'urbanisme, d'architecture et de construction. C'est précisément ce domaine des habitations romaines typiques des campagnes, les villae, que je vous invite à découvrir ensemble.

jeudi 1 octobre 2020

Une villa romaine au pays des Helvètes

Introduction

Construite autour de 170 de notre ère et couvrant 16 ha, la villa rustica d’Orbe-Boscéaz est le plus grand domaine rural connu en Suisse à l’époque romaine. La luxueuse résidence du propriétaire avait des dimensions exceptionnelles, 230 x 90 m, et elle était organisée autour de cinq cours, dont les deux principales étaient entourées de galeries à colonnes.

Des bains privés, équipés de bassins chauffés, étaient rattachés à cette partie résidentielle. Plusieurs pièces, de réception ou d’usage privé, étaient décorées de riches mosaïques au sol. L’ensemble était desservi par un système complet d’alimentation et d’évacuation d’eau, et certains tronçons d’égouts sont encore très bien conservés.

Le mur d’enceinte du domaine formait un carré d’environ 400 mètres de côté, et plusieurs bâtiments liés à l’exploitation du domaine y étaient accolés. A l’ouest du mur d’enceinte, un temple dédié au dieu perse Mithra a été construit au début du IIIème siècle.

De 1986 à 2004, le site a été le chantier école de l'Institut d'Archéologie et des Sciences de l'Antiquité de l'Université de Lausanne, et c'est durant cette période que l'intégralité de la partie résidentielle a pu être étudiée. Les ouvrages Urba 1 et Urba 2, qui sont les publications finales de ces fouilles, sont en vente au pavillon d'accueil.

Maquette de la villa (restitution hypothétique)


                              Photo: Sylvain Gailloud

Les mosaïques

Neuf mosaïques, découvertes au XIXème et au XXème siècles, sont les seuls vestiges actuellement visibles de cet important établissement. Elles sont le plus bel ensemble de mosaïques romaines connu au nord des Alpes. Conservées à leur emplacement d’origine sous plusieurs pavillons, elles offrent une grande variété de décors comme la mythologie ou encore des compositions géométriques. Un pavillon d’accueil présente une exposition avec une maquette de la partie résidentielle et une animation multimédia.

Pavillon 4 : mosaïque 8

Ornant une pièce de repos appartenant à l'aile thermale, cette mosaïque est l'une des plus belles et aussi l'une des mieux conservées du site. Les divinités de la semaine (Luna, Mars, Mercure, Jupiter, Vénus, Saturne, Sol) sont représentées dans des médaillons hexagonaux, de même que différentes figures mythologiques (Tritons et Néréides, Ganymède, Narcisse). Les angles sont occupés par le buste des saisons et les bords par des scènes de chasse.

Le pavillon abrite également trois bornes milliaires découvertes dans la région.


                                        Photo: Fibbi-Aeppli, Grandson


Pavillon 3 : mosaïques 6 et 7

Ce pavillon abrite deux mosaïques partiellement conservées qui décoraient des pièces probablement destinées à la réception des hôtes du propriétaire du domaine. La partie conservée de la mosaïque 6, dite du Cortège rustique, représente de gauche à droite un chariot tiré par deux bœufs et conduit par un charretier ; un oiseleur tenant un pot de glu et des baguettes ; un troisième personnage (berger ou chasseur) jouant de la corne. Il y a eu plusieurs interprétations pour cette mosaïque, et la plus probable y voit la mosaïque complète comme un calendrier et la scène conservée représenterait la saison hivernale.


                                                   Photo: Sylvain Gailloud

La mosaïque 7, représentant un décor géométrique avec des cubes en trompe-l'œil, décorait un couloir qui donnait accès à la pièce de la mosaïque 6.


                                        Photo: Sylvain Gailloud


Pavillon 2 : mosaïques 4 et 5

Ces mosaïques, ayant un décor illustrant des récits de la mythologie gréco-romaine, ornaient des pièces de l'appartement privé du propriétaire du domaine. La mosaïque 5 représente le labyrinthe, de forme carrée, avec en son centre le combat de Thésée et du Minotaure. Cette scène, connue par une lithographie réalisée peu après sa découverte, est malheureusement perdue suite au recouvrement de la mosaïque et sa redécouverte bien des années plus tard. Sur un côté, une bande à décor géométrique indique l'emplacement probable d'un lit.

La mosaïque n° 4, dite du Triton, était l'une des plus grandes et aussi l'une des plus belles de la villa. Malheureusement, elle a été en grande partie détruite quelques mois après sa découverte, et il n'en reste plus que quelques fragments, dont la plupart sont conservés sur place. Une lithographie, réalisée avant sa destruction, nous permet de connaître son aspect d'origine. La partie principale était composée de plusieurs médaillons avec des animaux, les saisons, Thésée et Ariane, Orphée, Ménade ainsi que des motifs floraux. La mosaïque avait une bordure avec des motifs végétaux et une abside ayant des motifs marins, dont un triton.


                                        Photo: Sylvain Gailloud


Pavillon 1 : mosaïques 1, 2 et 3

Ce pavillon abrite la mosaïque 2, entièrement conservée, ainsi les mosaïques 1 et 3 dont seuls quelques fragments sont conservés. Ces trois mosaïques ornaient des pièces de réception dans la partie résidentielle. La pièce de la mosaïque 2 servait de vestibule pour accéder au deux autres pièces. La mosaïque, dite "à feuilles de laurier" est composée de fuseaux et de carrés noirs et blancs. Les pièces des mosaïques 1 et 3 avaient une abside sur le côté Nord et étaient très probablement des salles à manger. La mosaïque 1 avait sa partie principale composée de médaillons carrés à décor géométrique et entourée d'une bordure de guillochis. Le décor de l'abside est uniquement connu par deux fragments de la bordure tressée. La mosaïque 3, dont il ne reste que l'angle sud-ouest, était composée de médaillons carrés avec des motifs floraux et une bordure tressée à double brin.

Pavillon 5 : mosaïque 9

La mosaïque 9, dite "d'Achille à Skyros", a été découverte en 1993 lors des fouilles de l'Université de Lausanne. Cette mosaïque ornait le sol d'une salle interprétée comme une bibliothèque. Elle est composée de deux tableaux centraux entourés par trente médaillons de motifs variés. Les tableaux centraux évoquent un épisode particulier de la guerre de Troie : Ulysse démasquant Achille sur l'île de Skyros. Dans le tableau supérieur, Ulysse portant un armement double et accompagné par un esclave jouant du tuba. Dans le tableau inférieur, Achille au milieu du gynécée, portant des armes et accompagné par sa fiancée.


                                           Photo: Jean-Paul Guinnard

Cette mosaïque étant en cours de restauration, il n'est possible de la voir que lors d'événements ponctuels comme les journées portes ouvertes organisées par l'association Pro Urba. Un panneau d'information sur cette mosaïque est visible dans le pavillon 2

Source et info pour visiter le site Pro-Urba : https://www.pro-urba.ch/

Je remercie Messieurs Sylvain Gailloud (http://www.archeoplus.ch/fr/presentation-fr.htm ) Fibbi-Aeppli, Grandson et Jean-Paul Guinnard  pour leurs photos.

Vidéo :